En tant qu’héritier du Mont-de-piété bordelais, le Crédit municipal de Bordeaux est le fruit d’une histoire complexe. Au fil des siècles, il a su s’adapter et devenir un acteur majeur de l’aide sociale, notamment grâce à son activité de prêt sur gage. Après des débuts prospères suivis d’une période de déclin, son offre de microcrédit social finit par s’implanter durablement dans le paysage bordelais. Aujourd’hui, cette institution bordelaise a trouvé cet équilibre entre action sociale et compétences bancaires qui fonde sa spécificité. Focus sur les étapes clés de l’histoire du Crédit municipal de Bordeaux !

Des Monte di Pietà italiens à la création du Mont-de-piété bordelais

Au XIXe siècle, les Bordelais ne connaissent pas encore le Crédit municipal de Bordeaux. En revanche, dès 1801, certains d’entre eux bénéficient de l’aide économique et sociale dispensée “chez ma tante” ou “au clou”. À savoir : le Mont-de-piété bordelais. Considéré comme une banque de charité et de bienfaisance, cet ancêtre des caisses de Crédit municipal est lui-même issu des Monte di Pietà italiens apparus au XVe siècle.

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L’origine des Monts-de-piété italiens

Les Monts-de-piété sont nés de l’ingéniosité de Barnabé de Terni, un moine italien franciscain. En 1492, il crée le premier Monte di Pietà, aussi connu sous le nom de Monte dei poveri, à Pérouse, au cœur de l’Italie.

La mission de cet établissement ? Faciliter les prêts d’argent tout en luttant contre l’usure et le paupérisme ouvrier grâce au prêt sur gage.

Pour subsister, ces Monts-de-piété perçoivent des intérêts faibles destinés uniquement à couvrir les dépenses d’administration. En tant que recours fiable en cas de coup dur ou d’imprévu, ils se développent rapidement sur le territoire italien. Peu à peu, ils gagnent d’autres pays, comme la France, la Belgique, et les Pays-Bas.

Le développement des Monts-de-piété en France, futures caisses de Crédit Municipal

Le Crédit municipal de Bordeaux ne s’est pas fait en un jour : son histoire est intimement liée à celle des Monts-de-piété français qui fleurissent un peu partout au XVIIe et au XVIIIe siècle.

Notamment sous l’impulsion de Théophraste Renaudot, philanthrope, médecin et journaliste, nommé Commissaire Général des pauvres en 1631.

  • En 1610, c’est à Avignon que le premier Mont-de-piété français voit le jour, largement inspiré par les Monte di Pietà italiens. La confirmation pontificale sera obtenue par bulle papale Paul V le 3 août 1612.
  • À partir de 1643, Louis XIII autorise 58 villes françaises à établir des Monts-de-piété.
  • Rétabli sous Louis XVI en 1777, la plupart des établissements fermés après la Révolution française retrouvent une existence grâce à Napoléon Ier.
  • Le Mont-de-piété bordelais voit le jour en 1801. Il se développe tout au long du XIXe siècle et figure parmi les établissements les plus actifs du pays.
  • En 1804, Napoléon accorde le monopole du prêt sur gage aux Monts-de-piété. Dès lors, le Mont-de-piété de Bordeaux connaît une longue période de prospérité.

Le Mont-de-piété bordelais, promoteur d’une économie sociale de bienfaisance

La loi du 16 février 1804 promulguée par Napoléon occupe une place centrale dans l’histoire du Crédit municipal de Bordeaux. Malgré les oppositions régulières des autres prêteurs, le Mont-de-piété de la capitale girondine conserve le monopole de prêt sur gage, justifié par la vocation de bienfaisance qui entoure la création de ce microcrédit social. De fait, le prêt sur gage offre de nouvelles capacités financières à toutes les couches de la société.

 

Les atouts du prêt sur gage au XIXe siècle comme aujourd’hui

Cet argent de secours participe activement à la lutte contre la précarité et offre une forme de filet de sécurité financier. Ainsi, le Mont-de-piété de Bordeaux devient un véritable instrument de régulation urbaine et sociétale au XIXe siècle. Comme l’explique Guillaume Pastureau dans sa thèse sur le sujet,  “il offrait par le prêt sur gage les capacités financières à une population pour éviter toutes formes d’exclusion”.

Le principe du Prêt sur Gage

À Bordeaux comme ailleurs, la notion de prêt sur gages repose sur un équilibre nouveau dans le domaine social. Avec ce dispositif, l’aide ne se matérialise pas sous la forme d’un don, mais sous la forme d’un échange, qui fait l’objet d’un contrat : un prêt contre un objet. Grâce à cet échange, la personne démunie ou soumise aux aléas de son existence ne reçoit plus l’aumône et conserve ainsi sa dignité.

XIXe siècle : un tournant dans l’histoire du Crédit municipal de Bordeaux

Au XIXe siècle, le Mont-de-piété de Bordeaux, comme ses homologues, est désigné sous le sobriquet de “Ma Tante” en référence à une anecdote cocasse. D’un point de vue règlementaire en revanche, sa dénomination évolue.

Le Mont-de-piété de Bordeaux reconnu établissement d’utilité publique

En 1851, les Monts-de-piété deviennent des “établissements publics à caractère social” par décret du président de la République. Par ailleurs, les nouveaux textes de loi des 8 mars, 12 avril et 24 juin 1851 les placent dans une relation étroite avec les communes. Par conséquent, le conseil d’administration du Mont-de-piété de Bordeaux est présidé par le maire de la ville.

Prêt sur gage en berne et bancarisation de l’activité

À la fin du XIXe siècle, l’activité du prêt sur gage décroît notamment face à la mise en place d’une politique sociale locale. Une baisse fortement marquée dans l’entre-deux-guerres, au moment où le Mont-de-piété devient une Caisse de Crédit municipal. Le 24 octobre 1918, les anciens Monts-de-piété sont renommés “caisses de Crédit municipal”. Dès 1919, le Mont-de-piété bordelais devient la Caisse de Crédit municipal de Bordeaux.

Si son nom change, son statut évolue également. Non seulement le Crédit municipal de Bordeaux conserve le monopole du prêt sur gage, mais il bénéficie de nouvelles attributions bancaires. Comme la centaine d’établissements ayant survécu à la baisse continue de l’activité du prêt sur gage, il étend ses activités aux comptes de dépôt à vue et aux comptes chèques.

Le Crédit municipal de Bordeaux, une banque à vocation sociale

En proie au déclin de son activité du prêt sur gage et aux conséquences de la Seconde Guerre mondiale, le Crédit municipal de Bordeaux traverse une période difficile de 1940 à 1954, comme tous les autres Crédits municipaux de France. Mais dans les années 50, l’établissement opère une véritable mutation bancaire.

1950, le début d’une mutation bancaire pour le Crédit municipal de Bordeaux

À partir de 1950, deux lois représentent une réelle opportunité pour l’établissement et confirment la bancarisation de son activité. 

  • Grâce à la loi de finances du 11 juin 1954, les caisses de Crédit municipal peuvent proposer des offres de crédit aux fonctionnaires. Un nouveau service mis en place au Crédit municipal de Bordeaux comme dans les 26 autres institutions publiques d’aide sociale en activité sur le territoire en 1955.
  • Trente ans plus tard, la loi bancaire du 24 janvier 1984 leur confère la qualité d’établissements de crédit et leur permet d’effectuer toutes les opérations bancaires. Progressivement, les activités bancaires, et en particulier les prêts aux fonctionnaires, remplacent le microcrédit social qui avait fait le succès des Monts-de-piété au XIXe siècle.

Dès 1973, l’activité de prêt aux fonctionnaires dépasse celle du prêt sur gage.

Le Crédit municipal de Bordeaux, une banque comme les autres ?

À partir de 1982, la stratégie bancaire du Crédit municipal de Bordeaux s’étoffe et prend le pas sur le microcrédit jusqu’en 1992. Mais cette activité reste empreinte d’une forme de solidarité. Le Crédit municipal de Bordeaux met ainsi en place un prêt social destiné aux chômeurs et familles en difficulté avec le CCAS (Centre Communal d’Action Sociale).

Le Crédit Municipal de Bordeaux, de 1990 à aujourd’hui

Dans un contexte économique et social particulier, le début des années 90 marque le début d’un retour aux sources pour le Crédit municipal de Bordeaux.

1990 : le retour en force de l’action sociale

En effet, la fin du XXe siècle se caractérise par une précarisation du marché de l’emploi, la baisse des salaires et l’augmentation du chômage. En parallèle, la loi du 15 juillet 1992 réaffirme le monopole des prêts sur gage et les confirme dans leur statut d’établissements publics communaux de crédit et d’aide sociale. Dans ce contexte, le Crédit municipal de Bordeaux se recentre sur son cœur de métier : l’action sociale, via le prêt sur gage et l’économie sociale et solidaire.

Le Crédit municipal de Bordeaux aujourd’hui : un établissement public et solidaire de crédit et d’aide sociale

Le Crédit municipal de Bordeaux crée aussi des alliances de poids avec des acteurs majeurs de l’économie sociale et solidaire bordelaise

En 1998, le Crédit municipal de Bordeaux accueille la Caisse Sociale de Développement local (CSDL) ainsi que l’Atelier budgétaire, en charge de l’éducation financière et, jusqu’à peu Bordeaux mécènes solidaires dans ses locaux de l’Hôtel Leberthon, situé dans le cœur historique de la ville de Bordeaux. L’établissement poursuit également son partenariat avec le CCAS de la ville de Bordeaux, et lui reverse une grande partie de ses bénéfices.

À ce jour, le Crédit municipal de Bordeaux propose des services de prêt sur gage, d’épargne solidaire, de crédit et de rachat.

Sa particularité ? Ses prérogatives s’étendent bien au-delà de l’Aquitaine ! En effet le Crédit municipal de Bordeaux regroupe 12 agences en France, sur la côte atlantique et dans les DOM. Cet établissement est ainsi présent à Bordeaux, mais aussi à Pau, Agen, Périgueux, Poitiers, Limoges, Orléans, Nevers, Auxerre, Dijon, Besançon et Belfort.